Le Rêve du jaguar – Une fresque ambitieuse qui m’a laissé un peu à distance

Rédigé par Mikko Aucun commentaire
reve du jaguar

Avec Le Rêve du jaguar, Miguel Bonnefoy livre un roman ample et baroque, traversé de rêves, de luttes et de légendes, sur fond de Venezuela en mutation. Malgré une écriture foisonnante et des figures fortes, j’en ressors avec une impression mitigée : admiratif par moments, mais un peu désorienté aussi.

Une histoire comme un fleuve

Le roman s’ouvre à Maracaibo, dans les bas-fonds, avec une mendiante muette qui découvre un nourrisson abandonné sur le parvis d’une église. Ce bébé, Antonio, va tracer une trajectoire improbable, de la rue à l’université, du bistouri à la politique. Autour de lui, une galerie de personnages bigarrés, marqués par le chaos et les espoirs d’un Venezuela en pleine tempête.

Bonnefoy tisse une saga familiale sur trois générations, avec des thématiques fortes : la résilience, l’ascension sociale, les luttes féminines. Le personnage d'Ana-Maria, gynécologue militante, m’a particulièrement marqué par sa dignité et son courage dans un pays où l’avortement est interdit. Sa présence apporte un ancrage plus moderne à un récit parfois hors du temps.

Le souffle du réalisme magique

Ce roman, c’est aussi un hommage à une tradition littéraire sud-américaine : celle du réalisme magique. On pense à García Márquez ou Alejo Carpentier. On croise des jaguars symboliques, des rêves annonciateurs, des guérilleros, des prêtres en transe, des dictateurs à la moustache menaçante.

C’est poétique, foisonnant, souvent beau. Mais c’est aussi, à mes yeux, trop. Trop de pistes ouvertes, trop de personnages croisés puis oubliés, trop de métaphores alambiquées. À force de vouloir tout dire, j’ai eu l’impression que le roman se dispersait, perdait en intensité ce qu’il gagnait en ampleur.

Une plume riche, mais parfois étouffante

L’écriture de Miguel Bonnefoy est indéniablement talentueuse, presque charnelle. On sent la luxuriance, la moiteur, les parfums de mangue et de révolution. Mais cette richesse stylistique, si elle séduit au début, m’a parfois semblé étouffante. À trop vouloir en faire, on perd parfois l’émotion directe.

Le roman donne parfois l’impression d’un tableau magnifique qu’on admire… sans parvenir à y entrer pleinement. J’ai lu certains passages avec admiration, d’autres avec distance, presque mécaniquement.

Un rêve qui m’a un peu échappé

En refermant *Le Rêve du jaguar*, je me suis demandé si je n’étais tout simplement pas passé à côté de ce que ce roman voulait vraiment me dire. J’ai vu la beauté, j’ai senti l’ambition, j’ai même respecté le travail. Mais je n’ai pas vibré comme je l’espérais.

Cela reste un roman important, engagé, littérairement ambitieux. Il parlera sans doute à beaucoup de lecteurs. Moi, j’y ai vu davantage une démonstration qu’une émotion.

🐆 À lire si vous aimez :

  • Les grandes sagas familiales à la sauce sud-américaine
  • Les romans engagés, aux personnages féminins forts
  • Le réalisme magique, les images puissantes, la densité littéraire
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Ce n’était pas un mauvais livre, loin de là. Mais ce n’était pas vraiment pour moi. Parfois, on peut reconnaître la beauté d’un rêve… sans vraiment le partager.

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